3 QUESTIONS À...


1/ En quoi les données du Système national des données de santé (SNDS) se distinguent-elles d'autres données permettant de repérer les facteurs de risque de l'Accident vasculaire cérébral (AVC) ?

Les études cliniques menées par des praticiens sont propices à bien identifier les facteurs de risque de l'AVC. Les enquêtes épidémiologiques et les registres également. Toutes portent sur des échantillons ou des populations circonscrites aux méthodes d'inclusion diverses. En revanche, jusqu'à maintenant, il n'existait pas en France d'étude permettant d'analyser la population exhaustive des personnes atteintes d'AVC sur le plan national et de faire des comparaisons régionales. Le SNDS représente une source qui offre cette possibilité à partir des données d'information médicale et de consommation de soins qu'il contient. Une série de cohortes en sont extraites qui incluent des victimes d'un primo-AVC survenu entre 2010 et, à terme, 2019. Elles constituent une source d'observation très précieuse du suivi médical dans la durée, incluant les 24 mois avant la survenue de chaque primo-AVC identifié et les 24 mois suivants, et l'évolution en dix ans des parcours de soins depuis le début du Plan d'actions national AVC 2010-2014. Concernant le repérage des facteurs de risque de l'AVC chez les adultes, nous avons élaboré une méthode à partir de la cohorte de 2012 afin de les quantifier et nous avons vérifié la robustesse de nos résultats à partir de la littérature existante sur le sujet. Ils sont très concluants concernant les facteurs de risque liés à des pathologies comme l'hypertension artérielle, la dyslipidémie, le diabète, etc. Nous diffusons cette méthode basée sur des algorithmes dans les publications de l'Irdes (Questions d'économie de la santé n° 240 et Rapport de l'Irdes n° 570).

2/ A quoi et à qui peut servir ce repérage ?

La fréquence des AVC et la gravité des séquelles qu'ils peuvent engendrer est telle que le gouvernement en a fait un objectif de santé publique à travers le Plan d'actions national AVC 2010-2014 qui préconise, notamment, la prévention de cette pathologie. Rappelons qu'en 2013, les AVC ont provoqué plus de 32 000 décès, soit 6 % des décès annuels. Dans ce contexte, le repérage des facteurs de risque de l'AVC est déterminant tant pour les éviter que pour améliorer la prise en charge des malades. Plus les patients comme les professionnels de santé disposent d'information, meilleures sont les chances d'éviter les décès et de limiter les séquelles d'AVC.
On observe ainsi qu'au sein de la cohorte d'adultes 2012 extraite du SNDS, plus de la moitié des patients présentaient au moins deux facteurs de risque de l'AVC, 51 % étaient déjà traités pour hypertension artérielle, 37 % pour dyslipidémie, 20 % pour diabète…
Parmi les avantages de ce type de repérage dans le SNDS, citons la rapidité de la mise à disposition des bases, la possibilité d'observer plusieurs années en amont de l'AVC, le faible coût de l'étude et l'utilisation en routine des indicateurs créés. Le suivi au fil du temps et les comparaisons spatiales des indicateurs créés constituent en outre un véritable outil d'adaptation des actions préventives pour la population, aussi bien auprès des institutions que des professionnels de santé.

3/ Comment compléter et enrichir cette étude ?

Les facteurs de risque repérés à partir des données du SNDS n'identifient que des patients dont la ou les pathologies sont connues et traitées, c'est-à-dire qui ont fait l'objet de remboursements par l'Assurance maladie. Si, pour les facteurs de risque d'AVC relevant de maladies, les données du SNDS restent robustes, en revanche, elles ne permettent pas d'identifier et de quantifier correctement les comportements et habitudes de vie à risque comme le tabagisme, l'obésité et l'alcoolisme, facteurs de risque d'AVC éminemment connus dans la littérature. Pour les capter, il faudrait apparier les données utilisées à des données issues d'enquêtes cliniques et épidémiologiques par exemple. Ceci permettrait la validation des algorithmes et l'apport d'éléments inobservables ici de nature médicale, environnementale, socio-économique et d'accès à l'offre de soins, en particulier en phase pré-hospitalière.
Pour autant, à partir du SNDS qui a l'avantage d'observer une population exhaustive, nous pouvons enrichir notre étude des facteurs d'AVC liés à des maladies par des analyses plus fines, visant notamment le ciblage des populations à risque afin de leur proposer des actions de prévention primaire, avant l'accident, et d'en mesurer l'efficacité et l'efficience dans le temps. De plus, la comparaison spatiale permettrait d'affiner les actions proposées localement.

Propos recueillis par Anne Evans