3 questions à... Yann Bourgueil et Julien Mousquès, co-auteurs du rapport (en ligne) « Comment améliorer la répartition géographique des professionnels de santé ? ». |
La principale mesure mise en œuvre a consisté à augmenter le nombre de médecins en formation par le relèvement du numerus clausus. La très forte augmentation de la densité médicale lors des trente dernières années n'a pourtant pas permis de résoudre les problèmes de répartition géographique. Les autres mesures mises en place sont diverses puisqu'elles concernent aussi bien le secteur hospitalier que le secteur ambulatoire ; elles visent à intervenir aussi bien au cours de la formation médicale initiale, à l'entrée dans la carrière, lors de l'installation ou durant la période d'exercice des médecins ; elles sont mises en œuvre à des échelons géographiques différents. Ces mesures sont essentiellement des incitations économiques modérées et ponctuelles. Elles prennent principalement la forme d'aides en nature ou financières : octroi de bourses d'études, aides au logement, primes, exonérations fiscales et/ou de charges, indemnités pour facilité les remplacements. Nous disposons de peu de recul pour juger de leur efficacité. Elles sont pour la plupart peu évaluées.
Parmi l'éventail des mesures mises en œuvre dans les pays développés, les plus novatrices et les plus prometteuses sont celles qui portent sur une réforme des modes de sélection et/ou du contenu de la formation médicale initiale. Il s'agit notamment de privilégier le recrutement des étudiants les plus à même d'exercer dans des zones mal desservies ou encore de sensibiliser les étudiants aux conditions d'exercice spécifiques de ces zones. Ce type de politique est assez développé dans les pays anglo-saxons (Australie, Canada, Etats-Unis ou Royaume-Uni). Il convient néanmoins de signaler que l'analyse de la littérature sur l'efficacité des mesures favorisant une meilleure répartition géographique des médecins ne montre pas de remède « miracle ». Elle souligne l'inefficacité de l'augmentation globale du nombre de médecins et l'insuffisance des seules mesures financières. L'approche globale des professions et la coordination des différents types de mesures notamment à l'échelon local, comme le lien avec une politique active en termes d'aménagement du territoire, ainsi que leur évaluation régulière, sont recommandés.
Plusieurs pays s'engagent ou se sont engagés depuis longtemps dans des politiques visant à regrouper les professionnels du secteur ambulatoire dans des lieux communs réels ou virtuels, qui peuvent être des centres de santé ou des cabinets de groupe libéraux. En rapprochant physiquement les différents professionnels, mais aussi en permettant une plus grande flexibilité dans l'organisation de leur travail et la répartition de leurs tâches par une réglementation, une formation et des modes de rémunération adaptés, ces pays visent à élargir l'offre de soins offerte aux patients comme à la rendre plus disponible. Dans le contexte français, des initiatives équivalentes se développent dans le cadre de réseaux de soins, de regroupements en maisons de santé. Elles sont marginales, le plus souvent sur le mode expérimental et leurs résultats sont mal connus. Ces formes d'organisation, si elles sont soutenues et encouragées par une politique publique, peuvent permettre à terme, d'offrir des conditions de travail satisfaisantes aux professionnels (possibilité de vacances, gardes moins fréquentes, meilleure régulation de la demande des patients, travail d'équipe) et donc favoriser leur maintien en zones éloignées.