3 QUESTIONS À...


1/ En quoi l'offre médico-sociale est-elle susceptible d'améliorer la santé des seniors ?

Les disparités de financements et d'accessibilité des soins médico-sociaux (aides à domicile, prise en charge en Etablissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), etc.) peuvent impacter la santé des seniors par deux mécanismes. Premièrement, il peut y avoir un effet de retard de soins : le manque d'accès à ces soins médico-sociaux peut créer des besoins de soins non satisfaits qui contribuent à la détérioration de l'état de santé des personnes fragiles (provoquant des chutes, de la déshydratation, etc.), et augmentent le besoin de soins médicaux ambulatoires ou hospitaliers plus chers. Deuxièmement, il peut y avoir une substitution entre les soins médicaux et médico-sociaux. Lorsque les alternatives de soins dans le secteur médico-social font défaut, la demande de soins médicaux peut augmenter. Par exemple, après une hospitalisation, le retour au domicile peut être retardé faute de disponibilité de soins médico-sociaux à domicile ou en établissement. Des séjours d'hospitalisations inappropriés sont une source de stress, de désorientation, d'absence d'activité, ou de risque d'infection nosocomiale, pouvant conduire à une détérioration de l'état de santé psychique et physique des seniors, notamment ceux atteints de Maladie d'Alzheimer et syndromes apparentés (Masa). Cette population fragile nécessite un accompagnement médico-social continu, elle sera donc particulièrement sensible aux modalités d'organisation, de financements, et d'accessibilité des soins médico-sociaux.

2/ Existe-t-il des inégalités territoriales en termes de financement et d'accessibilité des soins médico-sociaux ?

Il existe en effet d'importantes disparités géographiques de financement et d'accessibilité des soins médico-sociaux en France. Ainsi, un senior sur quatre réside dans une zone moins bien dotée à la fois en offre médico-sociale à domicile et en établissement. Ces territoires de vie pour lesquels le niveau d'offre médico-sociale est inférieur à la moyenne nationale dans toutes ses dimensions se retrouvent dans tous les départements français, mais sont plus présents en Ile-de-France, dans les Alpes, le Jura, en Charente-Maritime, en Dordogne ou en Alsace-Moselle. On trouve également des disparités en termes de financement de l'Allocation personnalisée d'autonomie (Apa) à domicile ou en établissement qui représente près de 80 % des dépenses départementales médico-sociales pour les seniors. En principe, le niveau de financement de l'Apa dépend des besoins en la matière (niveau de perte d'autonomie des seniors dans le département) et de la richesse des seniors qui en ont besoin puisque le niveau de subvention versée aux ménages varie en fonction du revenu des bénéficiaires. Toutefois, les départements sont libres de fixer la valeur du tarif horaire financé et de déterminer la générosité des plans d'aide, etc. En calculant un indice permettant de comparer le niveau de dépenses de l'Apa, ajusté par le niveau de perte d'autonomie et le revenu des seniors des départements, nous montrons qu'il existe d'importantes variations de financement médico-sociaux en fonction des départements.

3/ Quels effets ont ces inégalités sur les dépenses de santé des patients atteints de Maladie d'Alzheimer et syndromes apparentés (Masa) ?

Les dépenses d'hospitalisation des patients atteints de Masa sont plus élevées dans les territoires moins bien dotés en offre médico-sociale et dans les départements dont les financements de l'Apa sont les plus limités. Malgré ces dépenses d'hospitalisation plus élevées, il n'y a pas de différence significative concernant les dépenses totales de santé entre ces territoires, car les dépenses hospitalières sont compensées par des dépenses ambulatoires moins élevées (infirmiers, médecins généralistes, kinésithérapeutes, etc.). Ces résultats semblent suggérer qu'une meilleure accessibilité aux soins médico-sociaux s'accompagne d'un recours aux soins médicaux en ville plus important. Ils confirment que la politique médico-sociale des départements et le niveau d'accessibilité locale de l'offre médico-sociale sont des éléments déterminant la capacité des territoires à réduire les hospitalisations et à favoriser une prise en charge en ville des seniors atteints de maladies neurodégénératives, et ainsi à améliorer l'efficience allocative des dépenses de santé.