3 QUESTIONS À...


1/ Quel était l'objectif des expérimentations territoriales de parcours de soins de l'insuffisance rénale chronique mises en place dans six régions à partir de 2017 ?

L'insuffisance rénale chronique (IRC), qui concerne entre 7 % et 9 % des 35-75 ans, soulève des défis médico-économiques majeurs et présente des enjeux forts de santé publique : 29 % des patients commencent une dialyse en urgence alors qu'une meilleure prise en charge préalable pourrait l'éviter.

Dans ce contexte, l'objectif des expérimentations mises en place en 2017 était d'améliorer l'organisation de la prise en charge de l'IRC non seulement en amont, avant le traitement de suppléance par greffe ou dialyse, mais aussi au cours du traitement. En plus de la prévention et de l'orientation dans le parcours de soins avant le traitement de suppléance, les expérimentations visaient à favoriser le développement de la greffe rénale et de la dialyse hors centre. La greffe offre à la fois une espérance de vie plus longue, améliore la qualité de vie et permet d'éviter les contraintes de la dialyse (déplacements fréquents, fatigue…). Le suivi post-greffe est aussi moins coûteux, avec une dépense annuelle moyenne 4,5 fois moins importante que pour un patient dialysé. La dialyse hors centre consiste quant à elle à favoriser l'essor de la dialyse péritonéale, de l'autodialyse et de l'hémodialyse en unité médicalisée. Ces deux approches se traduisent à la fois par une meilleure qualité de vie et un moindre coût, et sont donc plus efficientes pour le système de santé.

2/ Quel a été l'impact de ces expérimentations ?

A partir d'une approche mixte qualitative et quantitative, l'objectif de cette étude a été d'identifier les changements organisationnels mis en place à la suite des expérimentations, et d'évaluer leur impact. Les résultats soulignent que les équipes des projets pilotes ont développé des actions pour renforcer la coordination entre les professionnels, en ville et en établissement de santé. Les financements ont été dirigés vers le recrutement spécifique d'infirmières, la mise en place d'outils de communication et la constitution d'équipes pluridisciplinaires.

Ces changements organisationnels ont permis d'améliorer la préparation à la suppléance et à la greffe en diminuant la proportion de dialyses initiées en urgence, et en augmentant l'accès à la liste d'attente de greffe. Concernant la prévention, des initiatives très variées ont émergé (campagnes de dépistage et journées d'information dans les lieux publics, outils d'information pour la sensibilisation des professionnels de santé et des patients, implication des pharmaciens et des laboratoires d'analyse médicale…), sans qu'aucun modèle organisationnel préférentiel ne puisse se dégager.

3/ Quelles nouvelles perspectives ces expérimentations ont-elles permis d'ouvrir ?

La coordination de parcours et de greffe s'est ancrée dans les organisations sur les territoires, mais le relais du forfait « maladie rénale chronique » à l'hôpital, mis en place fin 2019, ne suffit pas à maintenir toutes les actions entreprises, notamment celles dédiées à préparer les patients à la transplantation rénale, dont l'impact positif a été identifié. La pérennité de ces initiatives dépend désormais de la capacité des équipes à trouver des sources de financement supplémentaires.

Les projets pilotes de ces expérimentations ont néanmoins permis d'ouvrir de nouvelles perspectives et évolutions comme l'extension récente du forfait prévention pour tenir compte de l'arrivée des infirmières de pratique avancée et aussi son élargissement à d'autres professionnels (psychologue, assistant social). Pour le dépistage et la prévention, les liens créés avec les laboratoires de biologie et les médecins généralistes, et l'amélioration de la prise en charge précoce et coordonnée par les professionnels de ville, sont l'objet de nouvelles initiatives dans le cadre des expérimentations de l'article 51 relatives à de nouveaux modes d'organisation et de financement.