3 QUESTIONS À... : MAI 2014







1/ Quels sont le contexte et les objectifs du rapprochement de données de médecine générale et de remboursements par l'Assurance maladie ?

Bien que le secteur ambulatoire réponde à la partie la plus importante de la demande de soins, la connaissance des caractéristiques des patients et de la morbidité traitée y est beaucoup moins documentée que dans le secteur hospitalier. Or, dans le contexte du vieillissement de la population, la polypathologie et la perte d'autonomie complexifient les prises en charge en médecine de ville. Le développement des savoirs sur les pratiques efficaces permettra l'adaptation des organisations en soins primaires à ces évolutions et ainsi de rendre les parcours de soins des patients mieux adaptés et plus efficients. Le rapprochement des données cliniques de l'Observatoire de médecine générale (OMG) avec les données de remboursements du Système d'information inter-régimes de l'Assurance maladie (Sniiram) s'inscrit dans cet objectif global.

2/ Comment avez-vous réalisé ce chaînage et quels en sont les premiers résultats ?

Nous avons réalisé un test en deux phases afin de vérifier, d'une part, la faisabilité technique de ce chaînage et, d'autre part, sa pertinence. La première phase a consisté en l'appariement des deux bases (OMG-Sniiram) à partir des données concernant l'ensemble des patients ayant consulté en 2008 un des 30 médecins sélectionnés dans l'OMG. La seconde, à travers une analyse exploratoire, a permis d'évaluer l'intérêt de ce chaînage pour identifier deux populations souffrant de maladies chroniques : les patients diabétiques et les patients hypertendus.

80 % des patients ont pu être appariés, ce qui est un bon score avec les seules données du régime général. Et même si l'objectif n'était pas d'obtenir un échantillon représentatif, ces patients appariés ont des caractéristiques socio-économiques et de recours aux soins comparables à celles de la population générale, excepté en matière d'Affection de longue durée (ALD). Les patients de l'échantillon apparié présentent en effet un peu moins d'ALD (13 %) qu'en population générale (16,5 %). Enfin, grâce aux informations cliniques, l'appariement a permis de repérer des patients souffrant de diabète ou d'hypertension qui ne l'étaient pas avec les seules données du Sniiram et inversement. Les populations ont été identifiées par un code ALD Diabète ou Hypertension artérielle ou par des traitements spécifiques dans le Sniiram et par les résultats des consultations dans l'OMG.

3/ Comment améliorer cet appariement ?

Certaines données manquantes en 2008 ne le sont plus depuis, ce qui permettrait d'élargir le champ de l'appariement tant du point de vue de l'échantillon que des informations cliniques sur les patients : le Sniiram a intégré de nouvelles populations en plus de celle du régime général, les assurés de la Mutuelle sociale agricole (MSA) et du Régime social des indépendants (RSI). Par ailleurs, une exploitation des données sur plusieurs années (2009, 2010 et 2011) est envisagée dans le cadre du projet Prospere. Cette vision pluriannuelle permettrait d'apparier les personnes qui recourent moins d'une fois par an à un médecin. L'extension de la base sur plusieurs années permettrait également d'apparier des personnes qui ne consultent pas tous les ans.

En conclusion, même si l'OMG a été fermé en 2011, cette expérience montre que ce modèle de base de données apparié au Sniiram est intéressant pour cibler des populations à risque et mieux estimer la morbidité prise en charge en médecine de ville. Il pourra également contribuer à de nombreux autres travaux, pharmaco-épidémiologiques notamment. Constituer une base de données élargie et représentative des médecins et des patients pour la France entière suppose un changement d'échelle et relève dès lors d'un investissement pour l'avenir du renforcement des soins primaires.

Propos recueillis par Anne Evans

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