3 QUESTIONS À...


1/ Dans quel contexte s'inscrit votre étude sur les financements et restes à charge des fauteuils roulants en France ? Et pourquoi choisir de comparer les systèmes de prise en charge français, anglais, belge et suédois ?

Il existe en Europe principalement deux systèmes d'accès aux fauteuils roulants : soit un marché privé avec un remboursement de tout ou partie du prix du fauteuil roulant par l'Assurance maladie obligatoire, soit un système de mise à disposition publique de ces aides. La France se trouve dans la première configuration, avec, avant la réforme annoncée en février 2025, un système de financement complexe et à plusieurs étages pour les fauteuils roulants les plus coûteux. Nous avons choisi de comparer la France à des pays européens qui ont mis en place des réformes récentes de financement des fauteuils roulants. La Belgique dispose d'un système de mise à disposition des fauteuils roulants très comparable au nôtre : la distribution des fauteuils roulants est exclusivement assurée par un marché privé concurrentiel sur lequel interviennent de multiples vendeurs qui fixent librement leurs prix. Pour différentes gammes de fauteuils roulants, des forfaits publics de remboursement réduisent le reste à charge de l'assuré. Depuis la réforme de 2019, le financement est simplifié car uniquement assuré par les fonds régionaux alors qu'il reposait auparavant sur une base nationale et régionale. A l'opposé de ce système de marché libre, la Suède et l'Angleterre relèvent de systèmes majoritairement publics dans lesquels les fauteuils roulants sont mis à disposition des usagers. L'approvisionnement s'effectue par des systèmes d'appels d'offre qui permettent de sélectionner des fauteuils roulants à un prix fixé de façon contractuelle. Dans ces systèmes publics, des réformes récentes basées sur un système de bons d'achats, vouchers, visent à encourager les usagers à acheter leurs fauteuils roulants sur le marché privé, sans grand succès à ce jour.

2/ Quels sont les principaux avantages et inconvénients de ces systèmes ?

Dans les systèmes publics suédois et anglais, la dépense publique par fauteuil roulant est plus faible que sur les marchés privés. Pour les fauteuils roulants manuels de base, la dépense unitaire se situe autour de 370 € en Suède et en Angleterre, alors que les montants fixes de remboursement sont plus élevés en France (600 €) et en Belgique (775 €). Quand les fauteuils sont mis à disposition par le système public, le reste à charge est nul ou très faible pour l'usager, quelle que soit la gamme du fauteuil . Toutefois, les systèmes publics ont aussi d'importants revers : le choix est beaucoup plus restreint que sur les marchés privés, les fauteuils roulants électriques verticalisateurs sont complètement exclus de la prise en charge par le National Health service (NHS) anglais, le maillage insuffisant des centres publics de distribution occasionne d'importants délais d'attente pour accéder à l'équipement et à la réparation. Enfin, les offres régionales de fauteuils sont hétérogènes en Suède comme en Angleterre. Les systèmes privés permettent l'accès à une offre plus diversifiée. En contrepartie, les prix plus élevés sur les marchés privés sans prise en charge publique à la hauteur du prix de vente occasionnent des restes à charge plus conséquents. Malgré des cofinancements accessibles en France, le système était complexe et occasionnait des délais d'attente importants. La réforme de prise en charge intégrale avec un financeur public unique a pour objectif de simplifier les démarches et réduire les temps de réponse aux demandes de financement.

3/ Quels enseignements en tirer pour le système français ?

Pour les fauteuils roulants sans prise en charge intégrale par l'Assurance maladie, le système de financement français proposait des cofinancements possibles, mais sources de complexité administrative engendrant des délais de traitement parfois longs et un reste à charge pour l'usager. Bien que l'ensemble des paramètres de la réforme sur la prise en charge intégrale des fauteuils roulants ne soit pas encore connu, elle a pour objectif d'apporter une réponse à ce double écueil. En effet, l'Assurance maladie devient, comme en Belgique, le financeur unique de l'ensemble des fauteuils roulants. Cette simplification a également pour but de réduire les démarches et les délais.
Ainsi, les fauteuils roulants actifs d'entrée de gamme seront pris en charge intégralement, alors que la France était le seul pays à ne pas en proposer sans reste à charge.
Les travaux de l'Irdes sur le financement des fauteuils roulants vont se poursuivre. Ils pourront être mobilisés dans le cadre de l'évaluation de la nouvelle réforme.