3 QUESTIONS À...


1/ Quels sont les objectifs et les principes de l'évaluation de l'expérimentation Paerpa conduite par l'Irdes ?

L'expérimentation Parcours santé des aînés (Paerpa), lancée en 2014 dans neuf territoires pilotes, vise à améliorer la prise en charge et la qualité de vie des personnes âgées de 75 ans et plus et de leurs aidants, en faisant progresser la coordination des différents intervenants des secteurs sanitaire, social et médico-social. L'évaluation d'impact indépendante de ces projets pilotes a été confiée à l'Irdes afin, comme le précisait le cahier des charges, « d'apprécier l'impact des actions mises en œuvre et les conditions de leur généralisation ».
Ce premier bilan, qui s'appuie sur les données 2015-2016, permet d'estimer les résultats des projets territoriaux au moyen de critères communs, et en tenant compte de leurs spécificités territoriales, tant en termes d'organisation que de parcours de soins.

2/ Quels étaient les principaux enjeux de cette évaluation ?

L'expérimentation met à disposition des territoires pilotes de nombreux dispositifs visant à renforcer la continuité de la prise en charge entre le domicile, les établissements médico-sociaux et les hôpitaux, et à améliorer la coordination entre professionnels. Il s'agit de dispositifs avec des objectifs variés dont l'implémentation est hétérogène en fonction des stratégies, actions et calendriers définis dans les différents projets des territoires. Le nombre et la diversité des acteurs, la variété des interventions mises en œuvre dans chaque territoire, ainsi que l'hétérogénéité des territoires sélectionnés font de ces projets pilotes des expérimentations complexes.
L'évaluation de Paerpa recèle ainsi de nombreux enjeux méthodologiques car il faut prendre en compte les particularités des territoires dont la sélection n'a pas été aléatoire. Ces particularités peuvent être liées aux caractéristiques socio-économiques et d'offre de soins, mais aussi aux histoires des politiques de coordination dans les territoires. Pour cela, nous avons choisi la méthode du contrôle synthétique, développée pour évaluer des politiques publiques territoriales, et qui est adaptée à l'évaluation de ce programme multidimensionnel et multi-objectif.

3/ Quels sont les résultats de cette première évaluation ?

Pour estimer l'effet causal de Paerpa, sept indicateurs ont été identifiés en considérant les objectifs des expérimentations et la littérature internationale. Trois d'entre eux portent sur le recours à l'hôpital (nombre de journées d'hospitalisation par personne âgée, taux de réhospitalisations à 30 jours, hospitalisations non programmées), et quatre sont des indicateurs plutôt sensibles à l'organisation des soins primaires mais qui peuvent avoir des conséquences sur les recours à l'hôpital (hospitalisations potentiellement évitables, passages aux urgences, polymédication, prescriptions inappropriées).
Ces premières analyses, portant sur l'ensemble des territoires, ne permettent pas d'établir globalement un effet moyen significatif propre à Paerpa en 2015 et 2016. Compte tenu de la mise en place hétérogène des dispositifs dans chaque territoire et des délais de montée en charge des outils, ce résultat n'est pas surprenant : dans la majorité des territoires, la plupart des actions n'ont été effectives qu'à partir de 2016, avec une montée en charge qui s'étend jusqu'en 2017.
Les analyses par territoire permettent néanmoins de déceler des effets significatifs dans quelques territoires, et pour les indicateurs de résultats les plus sensibles à la mobilisation des acteurs de soins primaires. Nous observons notamment une baisse significative dès 2015 de la polymédication dans les territoires Paerpa d'Aquitaine et du Nord - Pas-de-Calais. Dans deux territoires, Midi-Pyrénées et Bourgogne, on constate un impact significatif de Paerpa, mais seulement à partir de 2016, en termes de réduction des hospitalisations non programmées. En Bourgogne, on note également un effet Paerpa sur les hospitalisations évitables.
En revanche, il n'y a pas d'effet visible de Paerpa sur deux indicateurs de recours à l'hôpital, quel que soit le territoire considéré. Ce manque d'impact visible sur les hospitalisations interroge sur l'efficacité des outils mis en place. Il serait légitime d'examiner d'autres leviers d'action pour améliorer les pratiques hospitalières et pour faire progresser la coordination ville-hôpital. Ces premiers résultats invitent cependant à ne pas tirer de conclusion hâtive : ils devront être confirmés à partir des données 2017 qui seront disponibles à l'été 2018 pour une publication des résultats fin 2018.

Propos recueillis par Anna Marek