Série de pré-articles scientifiques, en anglais ou en français, les Documents de travail présentent à la discussion un état de la réflexion sur une problématique de recherche. Ils sont soumis à parution dans des revues à comité de lecture.
Toutes les éditions de l'Irdes suivent un processus de validation. Elles sont relues par des chercheurs et des spécialistes des sujets traités (institutionnels et acteurs de terrain). Présentées lors de séminaires et colloques de recherche français et internationaux, elles sont discutées pour être enrichies.
Les Questions d'économie de la santé font l'objet d'une présentation systématique lors du séminaire interne pouvant réunir tous ces acteurs : les « Mardis de l'Irdes ».
L'influence des conditions de travail sur les dépenses de santé
Debrand T. (Irdes)
L'objectif de cette étude est d'estimer l'impact de certaines conditions de travail sur des indicateurs de dépenses de santé et de mesurer l'effet agrégé sur les dépenses de santé de la collectivité. Notre analyse empirique repose sur un échantillon de salariés âgés de 18 à 65 ; ces données sont issues de l'enquête Santé 2002-2003. Nous utilisons trois indicateurs des dépenses de santé : le nombre de recours aux médecins généraliste ou spécialiste au cours des douze derniers mois, la prise d'arrêts de travail sur une période de deux mois consécutifs, le recours à l'hôpital au cours des douze derniers mois. Nous estimons nos effets à l'aide de deux méthodes différentes : une méthode « naïve » et une méthode par appariement.
Nos résultats confirment que les conditions de travail semblent bien être à l'origine d'un accroissement des dépenses de santé. Les trois formes de pénibilités retenues (pénibilité physique actuelle, pénibilité physique passée et risques psychosociaux) induisent des modifications dans la consommation ambulatoire, dans la prise d'arrêts de travail et dans les hospitalisations. De plus, nous mettons aussi en évidence un effet supplémentaire du cumul des risques professionnels sur les dépenses de santé. Ainsi selon la méthode d'estimation retenue, les individus soumis au cumul des trois risques étudiés ont entre 22,4 % et 25,1% de consultations en plus relativement aux salariés sans exposition, entre 46,3 % et 56,1% d'arrêts de travail en plus et entre 27,2 % et 35,9 % d'hospitalisation en plus.
The Impact of Difficult Working Conditions on Health Expenditures
The aim of this study is to estimate the impact of certain difficult working conditions on health expenditure indicators and to measure the aggregated effect on public health expenditures. The empirical analysis is based on a sample of employees aged from 18 to 65 using data from the 2002-2003 French Health survey. Three health expenditure indicators are retained: the number of GP or specialist consultations over the last twelve months, prescribed sick leave over two consecutive months and hospitalisations over the last twelve months. Impacts are estimated using two different methods: the intuitive estimation method and the matching method. Results clearly confirm that difficult working conditions have a direct impact on increased health expenditures.
The three attributes describing difficult working conditions (current physical risk, past physical risk and psychosocial risk) cause modifications in ambulatory care consumption, sick leave and hospitalisations. Results also reveal an additional impact on health expenditure induced by the cumulative exposure to occupational risks. According to the estimation methods retained, individuals subject to exposure to the three occupational risks studied record 22.4% to 25.1% more GP or specialist consultations than employees without exposure to risk, 46.3% to 56.1% more sick leave and 27.2% to 35.9% more hospitalisations.
Social Capital and Health of Older Europeans
Sirven N.,
Debrand T. (Irdes)
This research uses a time-based approach of the causal relationship (Granger-like) between health and social capital for older people in Europe. We use panel data from waves 1 and 2 of SHARE (the Survey of Health, Ageing, and Retirement in Europe) for the analysis. Additional wave 3 data on retrospective life histories (SHARELIFE) are used to model the initial conditions in the model. For each of the first 2 waves, a dummy variable for involvement in social activities (voluntary associations, church, social clubs, etc.) is used as a proxy for social capital as involvement in Putnamesque associations; and seven health dichotomous variables are retained, covering a wide range of physical and mental health measures. A bivariate recursive Probit model is used to simultaneously investigate (i) the influence of baseline social capital on current health - controlling for baseline health and other current covariates, and (ii) the impact of baseline health on current participation in social activities - controlling for baseline social capital and other current covariates. As expected, we account for a reversed causal effect: individual social capital has a causal beneficial impact on health and vice versa. However, the effect of health on social capital appears to be significantly higher than the social capital effect on health. These results indicate that the sub-population reaching 50 years old in good health has a higher propensity to take part in social activities and to benefit from it (social support, etc.). Conversely, the other part of the population in poor health at 50, may see its health worsening faster because of the missing beneficial effect of social capital. Social capital may therefore be a potential vector of health inequalities.
Capital social et santé des Européens âgés
L'objet de cette étude est d'analyser les relations de causalité entre participation sociale (capital social) et santé des personnes âgées en Europe. Nous utilisons les trois vagues de l'enquête SHARE (Enquête sur la santé, le vieillissement et la retraite en Europe) auprès des individus de 50 ans et plus dans onze pays. Pour chacune des deux premières vagues (2004 et 2006), une variable dichotomique renseigne sur la participation à des activités sociales (associations, clubs, partis politiques, etc.) et sept variables dichotomiques renseignent sur l'état de santé physique et mental des répondants. Un modèle Probit bivarié et récursif est utilisé pour estimer l'influence de la participation sociale en 2004 sur la santé en 2006 et réciproquement, de la santé en 2004 sur la participation sociale en 2006. En plus des variables de contrôle usuelles, les données rétrospectives de la troisième vague d'enquête sur les histoires de vie (SHARELIFE) permettent de prendre en compte les conditions initiales de l'échantillon. Les résultats suggèrent un effet causal réciproque : la participation sociale favorise une meilleure santé et vice-versa. Néanmoins, l'effet de la santé sur la participation sociale apparaît plus important que l'effet inverse. Par conséquent, les individus âgés en bonne santé ont d'autant plus de chances de préserver leur santé à travers l'effet bénéfique du capital social. De même, ceux en moins bonne santé ont moins de chances de participer à des activités sociales et ne bénéficiant pas de leur effet bénéfique, ont à leur tour une probabilité plus forte de voir leur état de santé se dégrader plus vite. En somme, malgré ses effets individuels bénéfiques, le capital social est un vecteur potentiel d'accroissement des inégalités de santé parmi les personnes âgées.
Paru dans : Social Science & Medicine, vol 75, n° 7, 2012/10, 1288-1295. Social capital and health of older Europeans: causal pathways and health inequalities.